Chaque année, des stages sont donnés, sur des matières théâtrales bien définies,


à l’académie internationale d’été de Wallonie (AKDT) et dans d’autres structures




Réflexion :

Le choix d’une action scénique,

c’est à dire de la manifestation corporelle des sensations ou/et des émotions

me paraît essentiel.

Il faut une cohérence gestuelle plus qu'une « vérité» émotionnelle.



Le  jeu les sens et l’émotion



À propos du jeu


« Le geste signifiant » est une de mes préoccupations.

La pratique est un petit peu différente selon qu’il s’agisse d’opéra, de théâtre « naturaliste » ou de tragédie par exemple.


À l’opéra, ma préoccupation première (d’un point de vue scénique, pas musical évidemment)

est la compréhension, la limpidité du propos.

La plupart du temps, les œuvres sont chantées dans une langue différente de celle du public.

Il faut dire également que la mauvaise diction, souvent soumise à des impératifs de technique vocale,

rend même notre propre langue parfois obscure.

L’usage du « sur titrage » est un pis-aller catastrophique … on ne regarde plus ce qui se passe sur le plateau.

Il faut, donc, inventer et exprimer les gestes qui clarifient les actions, les sensations

et les émotions des personnages - même à distance –

comprendre et utiliser les mouvements inconscients qui sont porteurs de sens.

C’est donc sur cette base que je fonde mon travail de metteur en scène à l’opéra.


Au théâtre, le geste, le mouvement scénique a une fonction un peu plus complexe.

Comme il n’y a pas le problème de la langue,

lui donner simplement pour fonction de rendre le propos plus compréhensible est réducteur.

Ce qui me passionne, c’est d’établir une dialectique entre le langage du corps et le verbe.

Le corps dit,

tantôt le contraire de ce qu’affirme le texte

le frottement entre les deux expressions peut engendrer la réflexion

tantôt va dans le même sens que le texte et cela renforce le propos.

Ou encore exprimer tout à fait autre chose que le texte pour nous livrer encore un autre élément, un autre sens.

ou enfin il peut aussi sublimer le texte ou  le rendre métaphorique et même symbolique,

en lui donnant pour socle une forme particulière inattendue voire paradoxale (contrario).


A propos des sens


Le geste, l’action scénique engendre des sensations.

La manifestation corporelle de ces sensations fait partie du plaisir du public,

donne des clés de compréhension, permet l’identification du spectateur au personnage.

Elle permet également à l’acteur d’être au plus près, au plus sensible de son jeu

et donc de gagner en charisme et par voie de conséquence de sublimer la communication.

Il est donc très important pour moi, que la ligne anecdotique

(les actions scéniques, l’histoire qui se raconte physiquement)

ne soit pas incomplète, qu’il n’y ait pas de moment « sans que rien ne se passe ».

Il ne s’agit pas ici de bouger pour bouger, mais qu’à chaque moment, l’acteur ait quelque chose à faire

– et cela peut être micrométrique -

qui va dans le sens de ce que le texte (ou le personnage) veut nous dire.

À chaque moment de cette ligne anecdotique, correspond une sensation à exprimer

et l’ensemble de ces sensations forment la ligne sensorielle de la pièce.


À propos de l’émotion


Les actions engendrent des sensations, lesquelles engendrent les émotions.

Par la mémoire, l’acteur peut recréer assez aisément les sensations qu’il a déjà vécues

et s’il en recrée le contexte par l’action, l’état corporel-même de manière « technique » -

il peut établir les circonstances favorables à l’émergence de l’émotion et même à un certain contrôle

(on est ici dans le principe de jeu naturaliste propre à l’actor’s studio).

L’acteur éprouve quasiment les émotions et le public les éprouve par empathie.

Ce principe a ses limites. Ce sont celles de l’expérience intime de chaque acteur.

Cependant, il me semble que l’impact émotionnel du jeu sur le public se situe plutôt dans

l’identification à une situation dans laquelle se retrouve le personnage

plutôt que dans l’état émotionnel vécu par l’acteur à travers celui-ci.


Lorsque, vers les sous-bois Bambi fuit les chasseurs, que l’on entend le coup de feu au loin,

et que tout guilleret, il crie à sa mère qu’il a gagné la course … L’émotion du public est à son comble.

Pourtant Bambi n’est pas encore triste au moment où déjà le public sort le mouchoir.

De plus, Bambi est un dessin et un dessin n’éprouve absolument aucune émotion.

Dans ce cas-ci, comme d’ailleurs dans tous les cas, me semble-t-il,

ce sont bien les circonstances qui touchent le public.